Saint Francois d'Assise, au coeur d'une révolution monastique


















Giotto, Saint François prêchant les oiseaux, fin XIIIè s.

By Petrusbarbygere/Wikimedia [Public domain]

Un saint du XIIIè siècle

François d'Assise vit au XIIIè s., en un temps où l'Eglise catholique entre en crise. Au XIè s., la réforme grégorienne (voir Glossaire) avait permis au clergé (voir Glossaire) d'asseoir son pouvoir et de devenir la principale autorité de contrôle social. Mais le renforcement même de sa puissance le mène désormais à affronter une critique de sa richesse et de son pouvoir d'intercession (de jouer le rôle d'intermédiaire) entre les fidèles et Dieu. La multiplication des hérésies (voir Glossaire) est un témoin de cette crise.

La fondation des premiers ordres mendiants, celui des Dominicains, qui reçoit son nom de Dominique de Guzman et celui des Franciscains, s'inscrit dans ce contexte. Elle correspond à une révolution de l'organisation du clergé régulier (voir Glossaire): les moines mendiants, à la différence de ceux qui suivent la règle bénédictine (voir Glossaire), ne vivront plus cloîtrés dans des abbayes (ou monastères) rurales mais au milieu des fidèles, principalement (mais pas seulement) dans les villes.

Cette révolution, approuvée par le pape, correspond à un projet missionnaire (voir Glossaire): il s'agit de de faire auprès des fidèles un travail de conversion, au sens d'une redécouverte spirituelle et morale. Elle s'insère aussi dans un projet de reconquête: les moines dominicains, chargés du tribunal de l'Inquisition, joueront un rôle central dans la répression de l'hérésie cathare (voir Glossaire) dans le Sud de la France.

Saint-François d'Assise, par l'image qu'en projette le peintre Giotto sur les murs de la basilique d'Assise et par la manière dont l’Église catholique a traité sa mémoire, renvoie à une vision des ordres mendiants qui insiste sur leur spiritualité généreuse et qui tend à effacer le conflit par lequel l’Église impose sa puissance aux fidèles tout au long du Moyen-Âge.

Aujourd'hui encore, le pape François Ier, d'origine argentine, en choisissant ce nom, a voulu se faire le pape des pays du Sud économique, des opprimés et des pauvres, en référence à cette révolution monastique du XIIIè s. qui donne naissance aux ordres mendiants.

Le saint des pauvres

François, né à Assise v.1181-82, est le fils aîné d'un riche marchand drapier marié à une femme de la noblesse provençale. Destiné à succéder à son père, il mène une jeunesse dissolue et consacrée au métier des armes et notamment au conflit avec la noblesse locale. A ce titre, son histoire s'inscrit dans le contexte de l'essor urbain lié au développement à partir du XIè s. du grand commerce européen, en particulier dans les villes italiennes, et à la formation d'une bourgeoisie marchande qui revendique son autonomie à l'égard de la noblesse.

C'est à partir de 1204, à la faveur d'une maladie, qu'il se "convertit": il abandonne sa vie facile pour se consacrer à Dieu. La légende veut qu'une série de songes l'ait amené à renoncer à sa richesse et à être renié par son père. Il se fait alors missionnaire à la fin des années 1200 et vit du travail manuel et de la mendicité, vite rejoint par d'autres jeunes gens de la bourgeoisie. Dès 1210, il fait valider une première règle pour l'ordre qu'il est en train de fonder par le pape Innocent III. La corde, par laquelle il remplace sa ceinture de cuir, devient alors le symbole des franciscains (ou frères mineurs). Il participe en 1219 à une croisade en Egypte et rencontre le sultan. C'est en 1223 qu'il fait valider par le pape Honorius III la règle définitive de son ordre, qui commence à s'étendre en Europe et qui, à sa mort en 1226, compte entre 3000 et 5000 membres.

Ayant reçu les stigmates (voir Glossaire), il est canonisé seulement 2 ans plus tard, en 1228, par le pape Grégoire IX. Son corps est enterré dans la crypte de la basilique d'Assise, construite entre 1228 et 1253 et où un groupe de 28 fresques de Giotto, peintes dans les années 1290, fait son hagiographie.

L'empressement de trois papes successifs à consacrer son œuvre montre que la vie de François d'Assise illustre à la fois la crise et le renouvellement que connaît son époque. Cette crise n'est pas seulement religieuse, mais aussi sociale. François est le représentant de ce groupe en formation qu'est la bourgeoisie marchande et des valeurs nouvelles dont elle est porteuse, liées à la richesse, qu'il refuse au profit d'une recherche spirituelle.


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